Focus

Titres-Restaurants : la grande arnaque !

Un marché de 6 milliards d’euros bien vérouillé

Le marché des Titres-Restaurants représente 6 milliards d’euros. Un gros gâteau que les 4 opérateurs historiques (Sodexo – Edenred – Natixis – Up) ont un mal fou à partager, tant avec d’autres opérateurs potentiels qu’avec les autres membres de la chaîne de valeur tels les restaurateurs et autres professionnels accepteurs.

Après une première condamnation en 2001 pour avoir fixé les taux de commission appliqués aux commerçants de façon concertée, c’est une nouvelle affaire d’entente que l’Autorité de la concurrence s’apprête à boucler, toujours sur le thème de l’entente, cette fois ci en vue de mettre en place des barrières à l’entrée de nouveaux opérateurs.

L’Autorité enquête en fait sur ce que subodorent déjà tous les professionnels qui acceptent des titres-restaurants et ce dont auraient pu se convaincre avec un minimum de vigilance les organisations professionnelles dites représentatives (MEDEF, SYNHORCAT, UMIH, Syndicat de la Boucherie, de la Boulangerie,…) associées à ces opérateurs dans le cadre du Conseil National des Titres Restaurant (CNTR).

La nouvelle donne de principe du titre restaurant dématérialisé

En 2001, les 4 opérateurs réunis au sein de la CRT arguaient qu’il n’existait pas de raison objective pour que les commissions commerçants soient différenciées selon les opérateurs puisque le service rendu était le même. L’argument n’est pas stupide en soit, le seul problème étant que rien n’indiquait que le niveau de commissionnement fixé était raisonnable, faute de concurrence. Déjà à l’époque, l’Autorité relevait que le prochain avènement des titres dématérialisés devrait permettre d’attiser cette concurrence.

On peut dire que la CRT a mis un certain temps à poser les bases de l’architecture de ces titres dématérialisés, lesquels n’ont été autorisés par décret qu’en… 2014 ! De fait, ces titres sur carte à puce ou sur téléphone portable ont vu l’entrée sur le marché de nouveaux opérateurs.

Les soupçons actuelles de l’Autorité de la concurrence portent sur une éventuelle entente entre les 4 opérateurs (Sodexo – Edenred – Natixis – Up) au travers de la CRT (Centrale de Règlement des Titres) en vue de partager des informations confidentielles et faire échec à l’entrée sur le marché de ces nouveaux opérateurs ainsi que ralentir la dématérialisation des titres-restaurants.

Le problème de fond : qui veut vraiment d’un titre restaurant dématérialisé ?

Du point de vue des professionnels accepteurs pour lesquels les titres-restaurant peuvent constituer jusqu’à 80% de leur chiffre d’affaires, les titres dématérialisés sont à ce stade à rejeter au constat des taux de commissionnement appliqués, auxquels il convient d’ajouter des frais fixes ainsi que, cerise sur le gâteau, le commissionnement de la banque du fait de l’usage du TPE (Terminal de Paiement Electronique).

C’est la raison pour laquelle certains professionnels refusent purement et simplement les titres-restaurants dématérialisés, ce qui reste encore possible au regard du faible déploiement actuel de cette solution.

Ces professionnels trouvent parmi les salariés des alliés objectifs. On l’oublie en effet très souvent, mais l’usage des titres restaurants par leurs bénéficiaires est strictement encadré. Il n’est notamment pas légalement possible de voir des personnes payer leurs courses le samedi (voire le dimanche désormais) en grande surface avec des poignées de titres restaurants. De fait, les titres restaurants ne sont en principe utilisables que pour l’achat d’un certain nombre de produits listés, du lundi au samedi (hors jours fériés), pour un maximum de 19€/jour. La différence entre un titre papier et un titre dématérialisé est qu’il est parfaitement possible de paramétrer un titre dématérialisé en fonction de certains de ces éléments (jour et plafond journalier notamment) et donc… en fonction de la législation. Or, au regard de l’usage courant de ce moyen de paiement, usage largement hors la loi, il est peu vraisemblable que les salariés soient prêts à troquer leur papier contre une carte à usage limité.
Il n’est en conséquence pas certain, à ce stade, que le titre dématérialisé soit appelé à un grand avenir.